Nous croyions en la force des biens communs. Nous croyions en leur capacité à réduire les gaspillages, par le partage de connaissances et la mutualisation de l’effort. Une de nos réalisations a fini de nous convaincre de la viabilité du modèle.

Petit à petit, l’oiseau agile fait son nid…

Remontons cinq ans en arrière. Le CDSA33 nous sollicite pour la création d’un outil leur permettant de rendre visible leur activité sur Internet, et partager un référentiel à jour des clubs pouvant accueillir dans de bonnes conditions des personnes en situation de handicap mental et/ou psychique. Vous verrez sur la page dédiée à ce projet que le périmètre fonctionnel a bien évolué depuis.

C’est en tout pas moins de huit versions qui ont été réalisées en l’espace de quatre ans, au gré des budgets et des besoins. Quoi de plus agréable pour un commanditaire que de savoir que :

  1. la réalisation de son outil ne demandera pas le déblocage d’un budget faramineux au regard d’un cahier des charges issu d’un travail préliminaire pharaonique ;
  2. la solution logicielle n’est pas figée dans le marbre, et quelques semaines de développement suffisent à l’améliorer pour répondre à un quotidien évoluant sans cesse.

Ainsi, en prenant le temps de découvrir un nouveau mode de fonctionnement plus proche du partenariat que de la simple prestation, le comité a su tirer parti de la flexibilité offerte par ces pratiques : un budget lissé dans le temps, une adéquation du logiciel aux problématiques du moment et une relation de confiance installée par nos échanges fréquents et transparents.

Une telle agilité requiert des pratiques techniques rigoureuses garantissant la non-régression fonctionnelle. Un article à venir détaillera nos pratiques de developpement, comme le Test-Driven Development.

Depuis quatre ans, le CDSA33 utilise cet outil au quotidien. Depuis quatre ans, nous collaborons quelques semaines par an pour outiller leurs nouveaux enjeux. Aujourd’hui, la qualité de leur action est reconnue, et nous espérons y avoir contribué un tant soit peu.

Un point nous taraude malgré tout. Pourquoi ce qui est fait pour la Gironde ne pourrait-il pas servir à un autre département ? Comment ces derniers sont-ils outillés ?

Il se trouve que tout cela est en fait très hétérogène, en fonction de l’énergie déployée sur ces questions par chaque département. Et quand bien même chaque comité départemental serait aussi bien doté, pourquoi lancer différentes initiatives quand l’effort peut être partagé ?

Qui essaime le code récolte autant d’aide.

Essaimer : quitter une ruche pour fonder une colonie ailleurs.1

Techniquement, il est tout à fait possible de proposer le même outil à plusieurs départements ; rien ne l’empêche. Fonctionnellement, il est bien évident que ce qui a été fait pour le CDSA33 ne correspondra pas parfaitement aux besoins des nouveaux utilisateurs ; nous émettons l’hypothèse que cela sera tout de même mieux pour nombre d’entre eux. Quelles dispositions prendre alors pour pouvoir leur proposer cette solution logicielle ?

L’orientation libre a petit à petit fait son chemin dans les esprits. Après avoir initié nos interlocuteurs aux principes du logiciel libre, une réflexion a été menée sur les tenants et aboutissants de l’ouverture du code source. Mettre à disposition gratuitement le fruit d’un investissement n’est pas une démarche anodine. De sérieux avantages ont finalement eu raison de la légitime appréhension initiale.

Nouveaux utilisateurs, nouveaux regards

À chaque nouveau déploiement, un nouveau public prend en main la plateforme. Avec l’œil critique du nouvel arrivant, chacun de ces nouveaux utilisateurs est en capacité d’identifier, par exemple :

  • des problèmes d’ergonomie auxquels les habitués se sont accoutumés ;
  • des améliorations de fonctionnalités existantes issues de leur expérience avec d’autres outils ;
  • des aspects de leur quotidien qui gagneraient à être intégrés à l’outil.

Il est crucial de mettre à disposition les canaux de communication qui permettent la remontée de ces informations. Elles sont essentielles pour garantir l’adéquation du produit à un public de plus en plus large.

Cette effervescence est bénéfique : ces évolutions proposées par la communauté, développées sur la plateforme commune, profiteront à tous ses utilisateurs. Libérer son logiciel, c’est lâcher prise et valoriser l’intelligence collective.

Nouveaux financements, nouveaux contributeurs

Les idées foisonnent donc. Ceci dit, elles n’ont que peu de valeur tant qu’elles ne sont pas implantées dans le logiciel. Et pour cela, il faut y consacrer du temps de développeur. Alors que dans le cas d’un logiciel propriétaire, ce temps ne peut être financé que par le commanditaire, un logiciel libre peut varier les origines de ses lignes de code source :

  1. Financement ponctuel par un tiers : n’importe qui peut engager une équipe de développement pour améliorer le logiciel ;
  2. Contribution spontanée : n’importe qui peut améliorer le logiciel de ses propres mains (bagage technique conséquent souvent requis, mais pas nécessairement).

Ainsi, différents CDSA pourraient mandater différents prestataires pour différents développements, et les individus compétents pourraient en plus apporter des améliorations sur leur temps libre. Autant la première éventualité est facile à appréhender, autant la seconde est plus difficile à concevoir. Mais n’oublions pas que la majorité des serveurs Internet tourne avec un système d’exploitation libre, et donc issu aussi bien de contributions professionnelles qu’individuelles.

Logiciel libre en tant que service

L’option la plus durable est très certainement la mise en place d’une solution SaaS. Le logiciel est adapté de telle sorte que toutes les entités utilisent une infrastructure commune, tout en séparant évidemment leurs informations. Tous les clients utilisent à leur gré la solution logicielle administrée par un tiers, moyennant une rétribution récurrente sans engagement.

Avec une telle plateforme, le processus d’essaimage est encore plus fluide. Nul besoin de chercher un prestataire pour mettre en place la solution libre chez soi, une nouvelle instance est disponible du bout de la souris, après quelques informations précisées dans un formulaire en ligne. Ajoutons à cela une période d’essai gratuite d’un mois, et le risque pris par les comités départementaux intéressés devient quasi-nul.

Répliquons, répliquons !

Ce que nous réalisons avec ces acteurs, de nombreuses initiatives pourraient en profiter. Outillons une instance locale d’un mouvement global, et diffusons l’outil engendré, plutôt qu’imposer des outils globaux aux instances locales. La réalité est sur le terrain, les décisions qui en émanent sont souvent les plus adéquates.

Si la lecture de cet article vous a donné des envies de changement, des idées de quotidien à simplifier et faciliter, nous pouvons vous aider à imaginer, convaincre, réaliser… Nous répèterons ce schéma avec enthousiasme et implication.

P.S. : Une bien belle histoire que celle-là. Malheureusement, nous n’avons pas encore passé le cap de la libération du code. Nous y travaillons, comptez sur nous. Nous espérons pouvoir supprimer ce post-scriptum dans les semaines à venir ;-)

Il existe désormais une version illustrée de cet article :-)

Le post-scriptum est caduque, OLIGAA est maintenant un logiciel libre !

  1. Essaimer dans le Dictionnaire de l’Académie française, 9ème édition.